Titre : Martiens, go home !
Auteur américain : Fredric Brown
Première édition en 1955
Catégorie : roman de science-fiction humoristique
182 pages
Voilà que les martiens apparaissent soudain par milliards sur tout le globe terrestre. Ils viennent d’inventer la téléportation intergalactique et comptent bien en profiter pour venir sur notre planète.
Ils ne sont pas là pour nous envahir, ni pour faire du tourisme, et encore moins pour partager leurs connaissances avec nous. Non, ils sont là POUR NOUS FAIRE CHIER !
Imaginez un peu : ils passent leur temps à vous déconcentrer en s'asseyant sur votre tête, en révélant tous vos secrets les plus intimes, en se moquant de vous ou encore en s'immisçant dans votre chambre à coucher. Impossible d’avoir une discussion un tant soit peu sensée avec eux : ils nomment toutes les femmes Chouquettes et tous les hommes Toto ; et si vous leur demandez quel est le but de leur venue sur Terre ils vous rétorquent “c’est pas tes oignons Toto”.
Le personnage principal, c’est le comble, est écrivain de science-fiction. Comme c’est le cas pour tout le monde, les martiens le rendent fou et il va traverser des moments difficiles. Il en viendra à se demander si ces petits bonhommes verts ne sont pas de purs produits de son imagination. Quoi qu’il en soit ils sont bel et bien là et cassent les pieds de la planète entière. Il faut donc bien trouver un moyen de vivre avec.
Pour ceux qui ne connaissent pas Frédric Brown, sachez qu’il est connu en tant qu’auteur de science-fiction humoristique. On lui doit notamment L’Univers en folie.
J’ai bien aimé le concept de base (ces martiens venus nous casser les pieds), mais l’humour de Brown n’est pas de grande qualité. Il s’agit principalement d’un comique de situation, dont voici quelques exemples pour vous montrer un peu le niveau :
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Dans les premières heures qui suivent l’arrivée des extraterrestres, un couple qui s’est marié dans la journée s’apprête à consommer le mariage dans une chambre d’hôtel. Mais un martien s’incruste dans la pièce. Apprenant par la télévision qu’ils ne sont pas dangereux, et désirant vivement faire des galipettes, le couple décide d’ignorer le martien : ils éteignent la lumière et se cachent sous la couette, en se disant qu’au moins le martien ne pourra pas les regarder. Ils apprendront le lendemain que les martiens peuvent voir à travers la matière et que leur visiteur n’a donc rien manqué de leurs ébats.
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Un psychologue tente de former des coachs capables d’aider la population à vivre avec les martiens, mais pendant son discours d’introduction des extraterrestres se moquent de lui, dévoilent ses problèmes conjugaux et le déséquilibrent en soulignant qu’en réalité il n’a jamais obtenu son diplôme de psychologie. Le psychologue fond finalement en larmes, et ses clients l’abandonnent à son sort.
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Un docteur développe une thèse, dont il est très fier : les extraterrestres ayant pour but absolu de harceler les humains, ils auraient tout intérêt à leur affirmer qu’ils souhaitent rester indéfiniment sur Terre. Vrai ou non, cette affirmation aurait un effet catastrophique sur les nerfs des humains qui sont excédés par la présence de ces petits hommes verts. Mais pourtant ils ne tiennent pas de tels propos. Pourquoi ? Parce qu’ils n’ont en réalité pas l’intention de rester, suppose le docteur. Il leur suffirait pourtant de mentir. Mais voilà : ce docteur est persuadé qu’en réalité les martiens sont incapables de mentir. Voici leur faiblesse ultime.
A peine la rédaction de son discours achevé (en vue de sa conférence du lendemain), un martien débarque et lui rétorque :
“– T’es un petit futé, Toto. Et tordu sur les bords.
– C’est parfaitement logique, fit le Dr. Snyder. C’est absolument prouvé. Vous ne pouvez pas mentir.
– Tu crois, Toto ? Alors, écoute ça : je peux mentir. Essaie de voir la logique qu’il y a là-dedans.
Le Dr. Snyder essaya de voir ladite logique, et gémit. [...] Un hurlement de rire retentit dans son oreille."
Vous le voyez cet humour ne monte pas haut, même si ce n’est tout de même pas désagréable à lire. J’ai par contre ri aux dépens de l’auteur à plusieures reprises, notamment sur son sexisme et son racisme qui s’expliquent certes par l’époque d’écriture (années 1950) mais qui n’en sont pas moins atterrants.
Autre élément involontairement comique : l’éditeur. Rarement un éditeur m’aura fait autant rire, et c’est peut-être finalement le point le plus drôle de ce roman. Je veux parler du premier éditeur, et non pas de l’actuel, qui a tout de même oser demander à Fredric Brown d’écrire une postface pour dévoiler les éléments non expliqués dans son roman. Jugez par vous-mêmes : “Puisque vous êtes l’auteur, vous au moins devez savoir s’ils [les martiens] venaient de Mars ou de l’Enfer, ou si votre personnage Luke Devereaux avait raison en croyant que les martiens, comme le reste de l’univers, étaient des produits de son imagination. Il est déloyal envers vos lecteurs de ne pas satisfaire leur curiosité”. Je ne pensais pas qu’un éditeur pouvait être capable d’une telle maladresse.
Martiens go home est loin d’être un bon roman. L’humour, censé être le point central de cette oeuvre, m’a fait esquisser un sourire tout au plus. Quant au scénario il est plus ou moins inexistant.
Il s’agit toutefois d’une fiction très courte (182 pages). Je n’ai donc pas eu le temps de m’ennuyer. Je dirais même que cela m’a détendu.
J’attends toujours de trouver un roman de SF humoristique qui me fasse vraiment rire. Pour l’heure ni Douglas Adams ni Fredric Brown n’y sont arrivés.
Bonjour,
RépondreSupprimerAssez d'accord sur les conclusions. Délassant, ce n'est pas si mal, malgré tout. Sourires, oui, de là à en faire une œuvre comique...on en est loin. Je ne suis pas certaine qu'on puisse réaliser cet exploit sur un roman de SF entier, cela dit. L propos n'est pas là, même si le procédé peut être utile, ponctuellement.
Merci de ton commentaire ! Cela fait plaisir de voir que je ne suis pas seul à penser cela, car en lisant les commentaires sous l'article de Valunivers j'avais un peu l'impression que tout le monde vouait un culte à ce roman.
RépondreSupprimerTu ouvres une question intéressante en tout cas, je ne m'étais jamais demandé si la science-fiction pouvait trouver une utilité aux procédés comiques. C'est certain que c'est assez différent des comédies au cinéma et au théâtre qui servent avant tout de reflet de la société. J'ai l'impression que dans Martiens, go home ! le comique sert avant tout à rire de nos représentations habituelles de l'extraterrestre.
Ce livre m'aurait bien tenté, mais... moi aussi j'ai de la peine avec l'humour et la SF, dans le sens où c'est rare que cela me fasse bien rire, comme escompté. Un auteur y est arrivé, c'est John Scalzi avec son bouquin "Imprésario du Troisième Type". Ce n'est pas de francs rires, mais c'est plutôt un humour cynique à la Jack O'Neill qui, pour ma part, passe bien. Malgré tout, je vais quand même retenir cet ouvrage de Frederic Brown, pour me faire ma propre opinion ^-^
RépondreSupprimerOui, je pense que c'est important de te faire ton propre avis sur ce bouquin, d'autant que beaucoup de personnes l'adorent. Je note le nom de John Scalzi et de son bouquin. Je ne le connaissais absolument pas !
SupprimerEt j'y pense : l'Univers en Folie (non chronique sur mon blog) de Fredric Brown vaut peut-être davantage le détour que Martiens go home. Je l'avais lu il y a quelques années. Je n'avais pas été emballé, mais peut-être un peu plus que pour celui-ci
SupprimerVoilà c'est fait, je l'ai lu ^-^ Alors effectivement pas de gros rires (cela me va très bien aussi), et dans l'ensemble j'ai bien aimé cette lecture, que j'ai trouvée plutôt fraîche et intemporelle, malgré que le livre ait déjà plus de 60 ans. Un scénario classique (l'invasion extraterrestre) traité à l'opposé de ce que font les grosses prod américaines à l'heure actuelle, et cela fait du bien.
RépondreSupprimerOui j'ai vu sur le fil facebook que tu avais publié ton article. J'irai le lire avec intérêt. D'accord avec toi sur le fait que le traitement est pour le moins original ! Je comprends donc le sentiment de fraîcheur. C'est une question de goût ensuite, et peut-être aussi de "bon moment" (suivant mon humeur, ou ce que je viens précédemment de lire, je crois qu'un Fredric Brown ne me fera pas le même effet)
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