Titre : American gothic
Auteur français : Xavier Mauméjean
Première édition en 2013
Catégorie : roman uchronique
312 pages en poche
Au début des années 1950, Warner Bros décide d’adapter au cinéma Ma Mère l’Oie, un recueil de contes écrits par un certain Daryl Leyland et paru en 1938. Ces contes sont extrêmement connus aux Etats Unis et incarnent l’imaginaire populaire américain. Une adaptation au cinéma ne pourrait faire qu’un carton.
On est toutefois en plein maccarthysme. Il serait donc catastrophique qu’on découvre un dossier gênant sur Daryl Leyland qui viendrait entacher le film, voire l’interdire. Jack L. Warner ne veut donc prendre aucun risque : il engage Jack Sawyer, auteur d’un mémoire sur Leyland, pour enquêter sur la vie de l’auteur et nettoyer sa biographie.
Le roman de Xavier Mauméjean se présente comme une biographie de Daryl Leyland, réalisée grâce aux documents compilés sur cet homme et qui prennent notamment appui sur les rapports de Jack Sawyer. Chaque chapitre correspond donc à un courrier, un mémo ou à un rapport.
Pour ceux qui se disent, “bon sang, je n’ai jamais entendu parler de ce Daryl Leyland”, je vous rassure : vous n’êtes pas passés à côté d’un pan de la culture américaine, cet homme n’a jamais existé ! American gothic est une uchronie. Xavier Mauméjean s’appuie toutefois sur la vie d’Henry Darger, écrivain et peintre qui a quant à lui bien existé (1892-1973).
Henry Darger a vécu en orphelinat et a été interné pendant plusieurs années en hôpital psychiatrique. Si le bonhomme paraissait effectivement très dérangé (pratique de la masturbation en public), il a par contre produit une oeuvre artistique d’exception, découverte après sa mort : un récit épique illustré avec des assemblages d’extraits de comics (dont il a retravaillé la taille et la couleur).
L’oeuvre d’Henry Darger a longtemps été considérée comme de l’art brut. Xavier Mauméjean a imaginé la même chose avec son personnage : Daryl Leyland n’a aucune connaissance artistique ; son oeuvre vient de son vécu. Lui aussi a connu l’orphelinat et l’hôpital psychiatrique. Et Mauméjean y ajoute en plus les horreurs de la première guerre mondiale.
Ce roman se lit très facilement et avec grand plaisir. Non seulement la vie de Leyland vaut le détour (en plus d’être étonnante et touchante, elle nous plonge dans une époque), mais en outre Mauméjean réussit avec brio à donner vie à son personnage et à son oeuvre, Ma Mère l’Oie.
Le procédé narratif de la compilation de rapports pourra effrayer certains d’entre vous. J’ai moi-même eu du mal dans les premiers chapitres. Mais une fois qu’on s’est bien lancé, cela se lit tout seul. On se détache certes davantage du personnage qu’avec un autre procédé narratif, mais en même temps c’est justement cela qui lui donne un vernis de vérité. Mauméjean imagine d’ailleurs des récits contradictoires sur la vie de Leyland, émanant de personnes différentes, ce qui serait totalement impossible avec une autre narration.
American gothic m’avait été conseillé après que j’ai demandé à mon libraire quel était le meilleur roman de Mauméjean. Comme ce n’est que ma deuxième lecture de cet auteur (après La Société des faux visages) je me garderai bien de me prononcer. Mais je confirme en tout cas qu’il s’agit d’un très bon bouquin !
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